12 décembre 2022 · Chine
Bonjour,
Depuis le début de la pandémie la Chine fait office de croquemitaine qui à la fois repousse et fascine. Elle aurait entièrement contenue la pandémie grâce à une gouvernementalité mélant autoritarisme et numérisation totale de la vie, témoignant ainsi de sa puissance et de l’efficacité redoutable de son “techno-totalitarisme”.
Le collectif communiste chinois Chuang a brillament montré dans un livre essentiel que tout cela est faux. Malgré son expérience préalable des épidémies, la Chine a d’abord nié la menace qui déferlait avant de prendre en catastrophe des mesures désordonnées. Et ce sont les mobilisation populaires qui, paliant à la corruption endémique et aux rigidités bureaucratiques, ont permis de contenir une pandémie qui s’abattait sur une population pauvre et un système de santé délabré.
“Le succès face au virus n’a pas été le fait des mesures « autoritaires » de l’État, lesquelles, d’ailleurs, ont été surpassées pas les confinements bien plus rigoureux mis en place en Italie, en France ou ailleurs. En réalité, en Chine, la pandémie a été contenue grâce à l’effort réel et sincère de la plus grande partie de la population.” (Contagion Sociale, Chuang, Niet! éditions p238)
Malgré cela tous les tenants du libertarianisme sanitaire, désormais révendiqué de l’extrême-droite à l’extrême-gauche sous le nom de “vivre avec”, ont relayé ce “mythe de l’omnipotence totalitaire” vendu par le pouvoir Chinois à son propre usage. Ils en ont fait l’autre nom du “Zéro covid”, qui pourtant désigne simplement un objectif, dont les moyens d’y parvenir ont été des plus divers du Japon à la Nouvelle Zélande. Ceci en vue de justifier leur propre abandon des populations et la généralisation de l’eugénisme pandémique.
Si le Parti-État Chinois a du déployer une répression féroce c’est pour mieux masquer sa profonde impuissance et ses faiblesses infrastructurelles, mais aussi assurer l’encadrement displinaire de sa force de travail. Aujourd’hui face à la pression conjointe des marchés financiers et des récents soulèvements populaires le pouvoir chinois semble se lancer dans le pari de la libre circulation du virus, en s’abritant derrière le mensonge d’un virus qui avec Omicron serait devenu plus “bénin”. L’expérience de Hong Kong l’hiver dernier, qui a l’instar de la Chine actuelle était doté d’une très faible couverture vaccinale, a clairement montré que ce n’était pas le cas.
Nous, nous pensons toujours qu’il n’y a pas a choisir entre le libertarianisme sanitaire occidental et le régime disciplinaire chinois, qu’ils sont les deux faces d’un même capitalisme meurtrier, et que la seule voie désirable face à la pandémie est la diffusion massive de l’autodéfense sanitaire et de politiques de prévention bâties sur les principes de la santé sommunautaire.
Avec ce dossier nous vous proposons de reparcourir la gestion autoritaire de la pandémie mise en oeuvre par la Chine ces trois dernières années, les mobilisations et résistances populaires qu’elle a sucité, et d’entrevoir les questions qui s’ouvrent actuellement.
Très bonne lecture et
prenons soin de nos luttes,
Cabrioles
Carnet de recherche pour l’Autodéfense Sanitaire face au Covid19
L'entraide populaire face à la faillite de l'État Chinois dans les premiers temps de la pandémie
La majorité des participants à ces groupes d'entraide nouvellement formés n'avaient aucune expérience préalable de l'organisation communautaire. C'est l'urgence de la crise et l'échec du gouvernement qui les ont poussés à se rassembler et à s'engager dans des pratiques d'auto-organisation.
Tout ça ressemblait à un désastre | Chuang
Ils ont juste nié tout ce que les médecins affirmaient depuis des semaines, pour ensuite admettre qu’il y avait de quoi s’inquiéter, et pour finalement mettre la ville en quarantaine trois jours plus tard. Tout ça ressemblait à... un désastre ! [Rires]
Entretiens avec des amis de Wuhan réalisé par Chuang en 2020.
Échapper à la boucle fermée | Eli Friedman
Au printemps 2022, le virus a muté et les vaccins fabriqués en Chine sont devenus presque inutiles pour prévenir l'infection. Lorsque des cas ont commencé à apparaître à Shanghai en mars, peu de gens pouvaient anticiper la catastrophe sociale qui allait se produire. L'une des principales différences entre Wuhan et Shanghai est que cette fois-ci l'État a insisté pour que les gens continuent à travailler. S'efforcer de maintenir la circulation du capital tout en immobilisant complètement le force de travail est un défi, mais les autorités de Shanghai étaient prêtes à essayer. L'arme spatio-politique clé de leur arsenal était la boucle fermée.
D'Ürümchi à Shanghai | Par des socialistes de Chine et de Hong Kong
Cette tragédie est le résultat de la politique de gestion de la pandémie de la Chine, qui a sévèrement restreint les mouvements des citoyens ordinaires et leur a refusé l'accès aux produits de première nécessité pendant de longues périodes. Si ces politiques ont touché des millions de citoyens chinois, les Ouïghours et les autres minorités ethniques de la région du Xinjiang ont longtemps souffert d'une répression accrue.
Le dilemme de Xi Jinping | Emma Graham-Harrison
L’assouplissement de la gestion du Covid n'offre qu'une solution très temporaire au dilemme auquel le dirigeant chinois est désormais confronté. Et c'est un dilemme que son impitoyable accumulation de pouvoir personnel ne l'aidera pas à résoudre. Si Xi Jinping autorise un nouvel assouplissement des contrôles, la Chine risque d'être plongée dans une épidémie nationale dévastatrice.