Traiter les enfants comme des êtres invulnérables, c'est les traiter comme des êtres jetables | Blake Murdoch
Nous ignorons fondamentalement l'étendue des dommages à long terme que les réinfections continuent par le COVID causeront aux enfants, et les données dont nous disposons jusqu'à présent sont bouleversantes. Que sommes-nous prêts à risquer ?
Blake Murdoch est juriste, bioéthicien, expert en protection de la vie privée en matière de santé et en communication scientifique. Il est associé de recherche principal à l'Institut du droit de la santé de l'Université de l'Alberta. Ses intérêts de recherche englobent de nombreux sujets liés au droit, aux politiques et à la bioéthique de la santé, y compris l'éthique de la recherche, les cellules souches, la désinformation et la santé publique. Il écrit souvent sur des questions clés de communication scientifique et de santé publique pour des médias nationaux.
Les parents adhèrent généralement au mythe social selon lequel les enfants finiront toujours par s'en sortir et vivront en bonne santé. Cette croyance peut aider à faire face aux angoisses liées à l'éducation des enfants.
En réalité, rien ne garantit que les enfants iront bien. Lorsque vous enlevez les filtres roses et que vous regardez la vie telle qu'elle est, il n'y a aucune garantie. Comme le soulignent souvent les spécialistes du deuil, la mort est un élément naturel de la vie. Cependant, dans notre société, la mort peut être cachée et ignorée, au profit d'une sorte d'ignorance béate. Mais si votre enfant devient gravement handicapé ou meurt, vous comprendrez à quel point beaucoup de choses que vous trouviez importantes auparavant étaient dénuées de sens.
Le mythe selon lequel les enfants se porteront toujours bien est en grande partie le fruit du confort que nous ont procuré les progrès réalisés en matière de santé publique au cours des cent dernières années. Historiquement, près de la moitié des enfants mouraient avant l'âge adulte. Même en 1950, les taux de mortalité infantile étaient cinq fois plus élevés qu'aujourd'hui. Outre l'eau potable et l'hygiène, l'éradication quasi-totale de nombreuses maladies infectieuses grâce aux vaccins a constitué un progrès majeur. Cette tendance est en train de s'inverser, car de plus en plus de personnes deviennent hésitantes voire opposées à la vaccination.
Le handicap est ignoré de la même manière que la mort. Lorsque vous sortez dans l’espace public, la plupart des gens semblent aller bien. Cela s'explique à la fois par le fait que le handicap peut être invisible et par le fait que l'on ne voit qu'une partie du monde réel. Les adultes et les enfants handicapés sont souvent confinés chez eux, dans des maisons de soins ou dans des hôpitaux. Les lieux publics sont souvent le terrain de jeu des personnes valides, et ils donnent une image très inexacte de la réalité.
Je souligne ce point parce que la mort n'est pas le principal risque auquel sont confrontés la plupart des enfants. Le handicap l'est. Les enfants sont confrontés à de nouveaux risques liés à des maladies avec lesquelles la plupart d'entre nous n'ont pas eu à grandir.
La recherche montre que les risques de dommages et de handicap liés à l'infection par le COVID sont sérieux, et que les risques s'accumulent à chaque réinfections supplémentaires. Il n'est pas surprenant que le COVID puisse causer des problèmes à long terme, de nombreux autres virus le font également. Ce qui est nouveau, c'est que nous sommes en présence du virus aéroporté qui se propage le plus rapidement dans l'histoire, qui pénètre dans les vaisseaux sanguins et peut endommager presque toutes les parties du corps. Malgré cela, il se manifeste souvent de manière aiguë par des symptômes respiratoires seulement, ce qui donne lieu à une fausse équivalence avec un rhume banal. De plus, il mute de telle sorte que tout le monde peut l'attraper à plusieurs reprises.
Nous ignorons fondamentalement l'étendue des dommages à long terme que les réinfections continuent par le COVID causeront aux enfants, et les données dont nous disposons jusqu'à présent sont bouleversantes. Que sommes-nous prêts à risquer ? Sommes-nous d'accord pour que davantage d'enfants contractent un diabète ? Sommes-nous d'accord pour que beaucoup plus d'enfants développent une intolérance orthostatique très invalidante ? Qu'en est-il de la fatigue chronique, des troubles cognitifs, des troubles du sommeil et des problèmes cardiaques ?
Sommes-nous d'accord pour que les enfants soient hospitalisés pour des maladies infectieuses à des taux beaucoup plus élevés, comme cela a été le cas récemment ? Sommes-nous d'accord avec le fait que le COVID soit la première cause de décès par maladie infectieuse chez les enfants ? Par ailleurs, que se passe-t-il s'il y a un nombre de réinfections à partir duquel la moyenne des séquelles commence vraiment à se dégrader ?
En dépit de tous les éléments en faveur de la prudence, nous jetons aujourd'hui les enfants dans un monde où les protections sont quasiment inexistantes. En l'absence de nouvelles découvertes scientifiques révolutionnaires, les jeunes enfants seront pratiquement assurés de contracter de nouveaux variants du COVID plus d'une douzaine de fois avant d'atteindre l'âge adulte. Les vaccins actuels permettent de lutter contre le COVID Long, mais ne le préviennent pas aussi bien qu'ils ne protègent contre les formes aiguës sévères de la maladie.
Nous espérons simplement que les enfants iront bien. Je ne vois pas comment ils pourraient aller bien. Les données indiquent qu'ils n'iront pas bien. Mais personne ou presque ne fait face à cette vérité qui dérange.
De nombreux parents n'ont que peu d'options pour protéger leurs enfants, compte tenu de leurs contraintes économiques. Un faux récit pandémique très répandu raconte que les enfants ne sont pratiquement pas affectés par le virus. Il semble que la plupart des parents le croient, car la plupart d'entre eux ont choisi de ne pas vacciner leurs jeunes enfants. Nous devons changer ce récit et reconnaître comme il se doit le mal que le COVID fait aux enfants, comme nous le savons maintenant.
Certain·es diront que je dis aux gens de vivre dans la peur, que je soutiens une parentalité surprotectrice, ou que je ne veux pas que les enfants soient socialisés ou éduqués.
Non. Je dis que nous devrions reconnaître la réalité et y remédier. Le COVID a changé le monde et tenter d'imposer une "normalité" sans rien changer se soldera perpétuellement par une tragédie pour de nombreuses personnes.
De nombreu·es expert·es comprennent aujourd'hui que nous ne pouvons pas revenir à nos modes de vie d'avant la pandémie sans en payer le prix fort. Le coordinateur de la stratégie COVID de la Maison Blanche a candidement admis que l'approche actuelle implique que dans un avenir prévisible les hivers seront rongés par la maladie et que l'impossibilité d'accéder à des soins de santé nuira à de nombreu·ses patient·es dans le besoin. Le Canada est sur la même voie.
Les solutions pour protéger les enfants peuvent être glanées dans les comportements des élites fortunées, et elles impliquent la superposition de protections pour créer un air intérieur propre. Le récent Forum économique mondial de Davos a utilisé les systèmes de protection suivants : tests PCR quotidiens obligatoires avec accès par badge d'identification lié aux résultats, nouveaux "systèmes de ventilation de pointe", purificateurs HEPA partout, différents niveaux de masques et, semble-t-il, des systèmes d'éclairage UV qui tuent les virus. Nos enfants méritent ces protections, dans leurs écoles et ailleurs.
En traitant les enfants comme des êtres invulnérables, nous les traitons en fait comme des êtres jetables. Or, ils sont tout ce qu'il y a de plus précieux, pour nos vies et notre avenir. Leur santé à long terme est menacée et nous devons les protéger.
Publication originale (14/02/2023) :
Calgary Herald
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