Avec la "dette immunitaire", les Démocrates ont leur moment Ivermectine | Julia Doubleday
La dette immunitaire est une explication très pratique pour de nombreuses raisons. Premièrement, elle nous permet de préserver notre illusion nationale que le COVID a pris fin et n'est plus un problème. Deuxièmement, elle nous permet de continuer à vivre nos meilleures vies, non masquées, comme les foules trumpistes de 2020. Les explications qui nous demandent de ne rien faire, ni de faire face à la réalité que nous avons infecté en masse des millions d'enfants sans avoir la moindre idée de la façon dont ils pourraient être affectés à long terme par ce nouvel agent pathogène sont psychologiquement attrayantes pour des raisons évidentes.
Julia Doubelday est co-animatrice de l’émission The Committee Program! Chronique de l'agence de communication politique la plus mystérieuse du monde. Elle vient de lancer sa newsletter substack The Gauntlet, et nous vous conseillons la lecture d’une de ses articles déjà traduit en français : Pourquoi la presse financière fait-elle mieux que la gauche sur le COVID ?
· Cet article fait partie de notre dossier Dette immunitaire du 21 décembre 2022 ·
Si vous êtes parent, vous êtes sans doute au courant de la recrudescence des cas de grippe, de VRS, de COVID, du syndrôme pieds-mains-bouche, de streptocoque, de scarlatine, d'impétigo et de toutes les autres infections qui existent sous le soleil. Les mamans-blogueuses ont souvent abordé les sujets suivants : "Mes enfants tombent malades à chaque fois que je les renvoie à l'école" et "C'est vraiment dur d'avoir mes enfants à la maison en permanence - la maternité, pas vrai ?".
Sur Vox, un article a été publié aujourd'hui pour déplorer que les enfants soient constamment et continuellement malades, mais le ton de l'article ne reflète pas l'urgence de la crise. Au lieu de cela, Vox a traité les épidémies virales simultanées comme un désagrément résultant probablement du fait que les enfants auraient été moins malades ces dernières années. Le lavage des mains, et non le port de masques, était encouragé dans l'article.
Cette présentation mignonne d'une crise de santé publique nouvelle et extrêmement préoccupante sert à normaliser ce qui est objectivement anormal. Elle détourne également l'attention du nombre croissant d’études qui démontrent que le système immunitaire est endommagé après une infection par le COVID-19.
Que vos enfants soient constamment malades devrait nous mettre en état d’alerte.
Vos enfants qui rentrent de la crèche avec sept - oui sept, comme l'a récemment regretté une mère sur Twitter - infections virales simultanées, ce n'est pas normal ( le médecin traitant de l'enfant l'a fait remarquer en déclarant qu'il n'avait "jamais vu ça avant"). 19 enfants morts d'une angine à streptocoques au Royaume-Uni en l'espace de quelques semaines - pas normal. 6 enfants morts de la grippe en Colombie-Britannique au cours du seul mois de novembre - une information qu'ils ont d'abord tenté de cacher au public - bien au-delà des 1 à 2 décès annuels observés dans la province, alors que la saison ne fait que commencer. Des temps d'attente aux urgences de 45 heures en Ontario - pas normal. Les hôpitaux pédiatriques du pays ont installé des tentes de débordement - pas normal.
Depuis l'investiture de Biden et le lancement du vaccin, les libéraux se sont lancés dans un jeu de rôle "post-pandémie" qui n'a aucun fondement dans la réalité. Même les décès en phase aiguë, pour lesquels le vaccin a sans doute fait le plus de différence, continuent de s'accumuler - 400 000 décès sous Trump en dix mois, soit environ 40 000 par mois. Pendant ce temps, près de 700 000 sont morts sous Biden en 22 mois, soit (en arrondissant à la baisse) environ 30 000 par mois. Mais les décès à court terme, même s'ils n'ont jamais été éliminés, ne sont pas la seule façon dont le COVID mutile et tue.
Les effets à long terme de l'infection commencent tout juste à être connus, et ce que nous savons ne plaide pas en faveur d'une réinfection continue.
Les démocrates, comme les républicains trumpistes avant eux, s'acharnent à excuser les dirigeants de leur parti et à occulter la nature persistante de cette crise. Sur The Tyee, Andrew Nikiforuk a couvert ce que nous savons sur la dérégulation des cellules T chez les patients COVID et post-COVID mieux que je ne pourrais le faire, et je vous encourage vivement à consulter son article approfondi, "What If COVID Reinfections Wear Down Our Immunity ?" (Et si les réinfections COVID épuisaient notre immunité ?). Mais alors que la possibilité même d'une atteinte des cellules T au niveau de la population devrait faire la une des journaux, les démocrates et leurs alliés médiatiques ont décidé au contraire d'avaler en bloc une supposition pseudo-scientifique inventée en 2021 : la dette immunitaire.
La dette immunitaire est une explication très pratique pour de nombreuses raisons. Premièrement, elle nous permet de préserver notre illusion nationale que le COVID a pris fin et n'est plus un problème. Deuxièmement, elle nous permet de continuer à vivre nos meilleures vies, non masquées, comme les foules trumpistes de 2020. Les explications qui nous demandent de ne rien faire, ni de faire face à la réalité que nous avons infecté en masse des millions d'enfants sans avoir la moindre idée de la façon dont ils pourraient être affectés par ce nouvel agent pathogène à long terme sont psychologiquement attrayantes pour des raisons évidentes. Comme les gens de droite qui se sont emparés de l'ivermectine avant eux, les démocrates ont adopté la "dette immunitaire" sans avoir besoin de voir une seule étude confirmant son existence (et c'est une bonne chose, puisque de telles études n'existent pas).
"La dette immunitaire" est un concept simple qui postule que, puisque les enfants ont été bien protégés des infections pendant les saisons 2020-2021, ils "rattrapent" toutes les maladies qu'ils ont manquées au cours des deux dernières années. Afin de justifier la gravité croissante de ces épidémies (comme en témoigne le nombre d'hospitalisations), les promoteurs de la dette immunitaire pensent également que le fait de ne pas contracter la grippe pendant un an ou deux nuit à votre système immunitaire.
Ce concept présente de nombreuses failles, plus ou moins évidentes. Je vais m'attarder sur quelques-unes d'entre elles.
Premièrement, les maladies pédiatriques explosent même dans les régions qui n'ont jamais connu de confinement ou de port du masque. La prémisse elle-même - l'idée que les enfants ont été bien protégés de la maladie pendant plus de deux ans par des mesures de confinement stricte (lol) et de contrôle des infections - est fausse. En 2020, de nombreuses mesures étaient en place et le taux de maladie fut assez faible pendant cette saison. Mais l'hiver dernier, la plupart des mesures ont été assouplies et le maintien port du masque dans les écoles a été contrebalancé par le fait que les parents ont abandonné toute précaution et ont fait voyager et socialiser leurs enfants dans l'ère post-vaccinale. Dans certains endroits, les cas de VRS étaient en fait assez élevés l'année dernière - seule la gravité a changé, ce qui signifie que davantage d'enfants sont hospitalisés par rapport au nombre total d'infections. De plus, 90 % des enfants américains ont maintenant eu au moins une infection par le COVID, ce qui signifie que oui, ils ont été exposés aux germes et non, ils n'ont pas été bien protégés au cours des deux dernières années et demie.
Aucun confinement strict n'a jamais été mis en place, et dans les États républicains, c'était pratiquement un point d'honneur de s'exposer et d'exposer ses enfants au COVID aussi agressivement et fréquemment que possible. Les enfants de Floride sont restés dans les écoles. Et la Suède - le pays qui s’est rendu célèbre pour avoir rejeté toute mesure de prévention, gardant les écoles ouvertes, les entreprises en activité et les masques enlevés afin de poursuivre une insaisissable "immunité collective" - voit également des flambées de maladies pédiatriques. Aussi incroyable que cela puisse paraître, malgré la réalité irréfutable que les enfants suédois n'ont jamais été protégés contre les infections virales, ils ont eux aussi embarqué dans le train de la "dette immunitaire" ! Oui, selon les autorités sanitaires suédoises, les masques que leurs enfants n'ont jamais portés rendent ces mêmes enfants malades deux ans plus tard.
Pendant ce temps, des pays comme le Japon, la Corée, le Vietnam et la Chine, qui ont toujours encouragé le port du masque pendant la saison de la grippe depuis bien avant le COVID, n'ont jamais connu de telles maladies de masse dues à la "dette immunitaire", et ne connaissent pas non plus d'épidémies massives de VRS ou de grippe aujourd'hui.
Deuxièmement, votre système immunitaire n'est pas comme un muscle - il n'a pas besoin d'exercice pour continuer à fonctionner. Le fait de ne pas avoir contracté la grippe pendant un an n'entraîne pas une aggravation de l'infection par la grippe parce que votre système immunitaire aurait oublié comment fonctionner. En fait, à moins que vous ne viviez dans une véritable bulle, votre système immunitaire rencontre des tonnes de microbes au quotidien. Et l'idée que la dette immunitaire puisse s'appliquer à l'épidémie de streptocoque A qui se propage actuellement aux États-Unis et en Europe à partir de l'épicentre britannique est encore plus absurde. Le streptocoque est une bactérie, et le fait d'avoir un streptocoque ne confère aucune immunité contre un futur streptocoque. La plupart des enfants n'ont pas de streptocoque chaque année, et si c'était le cas, cela ne les protégerait en aucun cas d'une infection future.
Troisièmement, les immunologistes n'utilisent pas ce terme et leurs réactions vont de " Mais de quoi parlez-vous ? " à " Non, ça n'existe pas ". Peut-être le plus célèbre, l'immunologiste et expert en cellules t, le Dr Anthony Leonardi, a mis en garde contre une déficience immunitaire post-COVID depuis l'été 2020. Et comme il le souligne, les mêmes médecins qui s'étaient trompés à l'époque sont ceux qui remettent ça aujourd'hui. Les médias ont certainement - comme toujours - trouvé quelques experts prêts à apporter de l'eau à ce moulin, mais les immunologistes ne connaissent pas ce concept et s'accordent largement à dire que le système immunitaire n'a pas besoin de rencontrer constamment des agents pathogènes pour rester fort.
D'autres spécialistes se sont lancés dans le débat pour exprimer leur accord. Le Dr Satoshi Akima, néphrologue et médecin interne spécialisé dans l'immunothrombose à Sydney, l'a qualifié de "propagande". L'épidémiologiste David Fisman a utilisé les données des services de santé pour expliquer comment les cas de VRS en Ontario indiquent un préjudice immunitaire post-COVID. Le Dr Kashif Pirzada, médecin urgentiste, qualifie la notion de dette immunitaire de "pure fiction".
Quatrièmement, lorsque nous examinons de près les différentes cohortes d'enfants (c'est-à-dire les différents segments de la population pédiatrique regroupés par âge), nous constatons que les enfants qui n'ont pas contracté le VRS lorsqu'ils étaient bébés s'en sortent mieux avec leurs infections retardées par le VRS que les enfants infectés plus tôt. Non seulement ces résultats ne soutiennent pas l'idée d'une " dette immunitaire ", mais ils montrent que c'est le contraire qui est vrai : retarder l'infection chez les jeunes enfants, et en particulier chez les nouveaux-nés, produit de meilleurs résultats, et non de moins bons. En fait, les enfants les plus malades sont ceux qui sont nés après la fin des mesures de confinement et de masquage ! Dans le graphique ci-dessous, nous pouvons voir que les enfants âgés de 6 à 12 mois ont connu un pic massif d'infections par le COVID avant de voir un pic presque exactement équivalent d'infections par le VRS.
Ces données, qui sont autant d'informations supplémentaires qui nous éloignent de l'"absence de maladie" comme explication de ces maladies et nous amènent à penser que le système immunitaire a été endommagé après le COVID, ont même attiré l'attention de l'ancien directeur général des services de santé des États-Unis, le Dr Jerome Adams, qui a déclaré sur Twitter que "plus nous en apprenons sur le COVID, plus je suis inquiet".
Maintenant, une précision : il existe des preuves à l'appui de ce que l'on appelle un "retard immunitaire ". Il s'agit du concept selon lequel, étant donné que moins d'enfants étaient malades en 20-21 et moins en 21-22, il pourrait y avoir un effet de "double cohorte" ou même de "triple cohorte", conduisant à des groupes multiples d'enfants malades - on pourrait s'attendre à un nombre double ou triple d'enfants malades, bien que la gravité ne soit pas affectée. En d'autres termes, c'est un effet au niveau populationnel, alors que la "dette immunitaire" est censée avoir un impact sur les enfants individuellement.
Examinons quelques éléments ci-dessous et voyons si ces chiffres pourraient représenter, charitablement, ne serait-ce qu'un effet de triple cohorte :
Le Canada est en proie à une grave crise des hospitalisations pédiatriques ; le graphique ci-dessous montre que les normes pré-pandémiques moyennes des admissions pédiatriques pour cette période de l'année étaient inférieures à 25. Pendant la saison 2022, ces admissions sont de 225, soit 9 fois la norme.
Le Pays de Galles rapporte plus de 850 cas de scarlatine en une seule semaine : Le nombre moyen de cas de scarlatine pour la même semaine au cours des trois années précédentes était d'environ 25. Donc, environ 35x plus de cas que la norme pré-COVID.
Et ces exemples sont loin d'être isolés. Nous observons des maladies et des décès qui ne peuvent tout simplement pas être entièrement expliqués par un effet de double ou triple cohorte.
Quelques médias ont tenu compte de la réaction des immunologistes - dont beaucoup ont utilisé les réseaux sociaux pour affirmer que non, ce concept n'existe pas en immunologie, et que non, bien sûr, vos enfants ne doivent pas attraper la grippe chaque année pour rester en bonne santé. Le Financial Times - qui, comme je l'ai noté dans mon dernier article, fait un excellent travail en matière de journalisme sur le COVID - a récemment publié "La ‘Dette immunitaire’ est un concept erroné et dangereux", et Salon un article intitulé "Votre système immunitaire a-t-il besoin d'une séance d'entraînement ? La mauvaise science derrière la ‘dette immunitaire’, expliquée".
Mais dans l'ensemble, la presse "de référence" a adopté les allégations de la dette immunitaire ; certains, comme le New York Times et le Washington Post, les ont simplement acceptées comme des faits et continuent d'y faire référence alors que les maladies, les hospitalisations et les décès se multiplient. Des décès d'enfants. Ils savent que la légitimité publique de leur journal poussera les parents à accepter cette pseudo-science comme un fait établi, alors ils l'emploient généreusement et sans justification, ne mentionnant jamais les nombreuses études confirmant les dommages du système immunitaire suite au COVID. Par ailleurs, reconnaître que l'approche basée sur la réinfection massive et continue a effectivement porté préjudice à toute une génération d'enfants n'est pas quelque chose que vous voulez faire lorsque vous et votre journal avez poussé sans relâche à renvoyer les enfants dans des écoles dangereuses et à retirer leurs masques.
Il est franchement effrayant de voir le monde réagir à l'engorgement des unités de soins intensifs pédiatriques par un haussement d'épaules et une confiance aveugle dans un concept complètement réfuté. Il est inquiétant de constater qu'avec très peu d'encouragement, les démocrates ont accepté en bloc l'idée que les masques font du mal à leurs enfants, une idée qui appartenait à la droite de la droite en 2020. Pendant la folie de l'Ivermectin, je pensais que les Démocrates n'étaient pas disposés au même niveau de déni et de pensée grégaire que les Républicains, qui cherchaient une explication à la mort massive en cours qui n'impliquerait pas Trump ou qui les obligerait à faire des sacrifices mineurs. Peut-être que les gens ne mouraient pas vraiment. Peut-être qu'il y avait un remède secret caché au public. Peut-être que le vaccin était responsable.
Ce sont maintenant les démocrates qui ont recours à ce type de conspiration pour éviter de faire face à la réalité ou exiger des réponses de l'administration Biden. Peut-être que les masques ont endommagé leur système immunitaire. Peut-être que le confinement les a rendus malades. Peut-être que le streptocoque est plus mortel maintenant. Peut-être devrions-nous continuer à réinfecter les enfants avec le COVID, encore et encore et encore, même si des études ont montré que chaque réinfection comporte un risque plus élevé de complications graves, d'hospitalisation, de persistance virale et de décès.
L'idée qu'un enfant né aujourd'hui puisse contracter la COVID 40 fois avant l’université et vivre une vie normale et en bonne santé, n'est absolument pas étayée par ce que nous savons de cette maladie. Elle endommage les vaisseaux sanguins. Elle altère le système immunitaire. Elle augmente le risque de diabète, de crise cardiaque, d'attaques et de caillots sanguins. Elle peut endommager vos organes, vos poumons, vos reins, votre foie et votre cerveau. Elle compromet votre fertilité, vous vieillit biologiquement et peut entraîner la perte des cheveux, des os et des dents. Il n'existe pas d'immunité à long terme et les réinfections deviennent plus dangereuses avec le temps. La persistance virale est observée chez une minorité importante de patients, ce qui entraîne une activation continue des cellules T. Cela peut conduire à l'épuisement de ces cellules au fil du temps (destruction totale du système immunitaire, comme c'est le cas chez les patients atteints du SIDA avec une infection persistante par le VIH).
Il est temps de prendre au sérieux la déficience immunitaire post-COVID et d'accepter qu'une "nouvelle normalité" implique, pour commencer, une ventilation de haute qualité partout, le travail à domicile indéfiniment et un port généralisé de masques de haute qualité. Ce n'est pas une maladie avec laquelle nous pouvons vivre - et certainement pas de la manière dont nous vivons avec. Le cosplay "Bonne vieille normalité" ne ramènera jamais 2019, mais il tuera et mutilera beaucoup plus d'enfants avant que nous en ayons fini avec lui. Comme les républicains avant nous, nous méritons mieux que de nous faire dire de retourner au travail et de savourer nos infections bi-annuelles. Suivre leurs traces en avalant toutes les demi-vérités sans fondement que nous balance notre gouvernement ne nous laissera pas mieux lotis que la meute trumpiste.
Publication originale (16/12/2022) :
The Gauntlet
· Cet article fait partie de notre dossier Dette immunitaire du 21 décembre 2022 ·